Parfums de niche : la tentation de l’ultra premium
Dans un marché où les prix des parfums augmentent, certaines marques vont plus loin et créent des nouveaux produits avec un positionnement encore plus luxueux. Analyse.
En 2007, les parfums Serge Lutens coûtaient entre 79 € pour les vaporisateurs d’entrée de gamme, à 105 € pour les ‘flacons de table’ réservés au Palais Royal. En 2015, les prix s’étalent entre 90 et 160 € pour les mêmes produits. Comme pour les autres marques de niche, la hausse des prix est chaque année manifeste. Chez Dior par exemple, la ligne de parfums privés, initiée en 2004 avec Bois d’Argent et Eau Noire, a plus que doublé en 10 ans. Certes les coûts de fabrication (prix des matières premières…) ont augmenté, mais à titre de comparaison l’inflation est estimée à 16 % sur la même période.
La parfumerie alternative, plus encore que le circuit sélectif, a vu ses prix exploser. L’augmentation des prix s’est jusqu’à aujourd’hui faite de manière plutôt discrète, avec des hausses régulières de 3, 5 ou 10 € en début ou cours d’année.
Mais depuis peu les marques s’essaient à des collections avec des prix délibérément premium, voire ultra premium. Les parfums Serge Lutens (groupe Shiseido) ont ainsi décidé de lancer une nouvelle ligne baptisée Section d’Or. La première fragrance de cette ligne se nomme L’incendiaire.
Son prix de lancement est de 450 €, bien au-delà des tarifs habituels de la marque, eux-mêmes d’ailleurs plutôt bon marché par rapport à d’autres marques de niche comme Kilian ou Frédéric Malle.
Chez Frédéric Malle, même désir d’hyper sélectivité avec The Night, parfum ‘à base de vrai oud’ destiné au Moyen-Orient. Comme pour la ligne Section d’Or de Lutens, le prix est 3 à 4 fois supérieur aux autres parfums du créateur.
Il s’agit là d’une vraie tendance qui est amenée à se développer dans les prochaines années. Sous l’impulsion de points de vente très haut de gamme comme Harrods –mais aussi de zones géographiques comme Dubaï et la péninsule arabique, les marques créent des produits d’hyperluxe répondant à une demande.
Chez Harrods par exemple, les parfums à plus de 200 livres sont très nombreux. Les créations de Roja Dove peuvent atteindre 750 livres et les flacons constitués de cristal ou de métaux précieux dépassent les 1000 livres.

Ferragamo, Xerjoff, Roja Dove, Lalique. De 180 à 2500 livres : différents parfums vendus sur le site de Harrods (prix au 23 mars 2015).
Entre la niche d’entrée de gamme, aujourd’hui assez proche de 100 euros le flacon et les éditions d’art dépassant les 1000 euros, s’installe une nouvelle gamme de produits avec un positionnement niche super-premium.
Pour sa nouvelle ligne baptisée « Les White » la marque française Jul et Mad propose des flacons présentés dans des coffrets laqués plaqué or. Le prix est de 485 €, soit à peu près le double de la collection classique. Pour autant les différentes fragrances de la marque seront également proposées dans un flacon simplifié, sans coffret et vaporisateur de voyage, à un prix moindre (145 à 165 €). La demande émane de consommateurs ayant déjà acheté les fragrances avec leur écrin.
On le voit donc, la hausse des prix de la niche s’accompagne d’une plus grande segmentation de l’offre.
Par ailleurs, de nouvelles concentrations plus intenses permettent d’accompagner les prix supérieurs de ces nouveaux produits.
A l’avenir, les prix devraient continuer à croître et les nouveaux produits à monter en gamme.
La difficulté pour les marques de niche est, et sera, de justifier le discours auprès des consommateurs. Un certain nombre d’entre elles ne sont aujourd’hui pas prêtes ou pas encore crédibles.
Nicolas
Bonjour et merci pour votre analyse bien intéressante, d’autant plus qu’elle est très actuelle à mon point de vue.
Le marché de parfums de nos jours est tel un océan énorme qui nous inonde sans relâche. Cette marée parfumée nous apporte des produits qui sont souvent très loin d’être nommés parfums dignes d’attention, et encore moins d’être portés. La brebis Dolly cloné de la parfumerie gagne du terrain, des lancements qui ne font que se multiplier (on n’ignore pas ces chiffres: années 1980 – une quarantaine de lancements. En 2006 on en a vu presque 700. De nos jours ça fait en moyenne 1500 parfums, n’est-ce pas?).
La chimie, elle, a fait son affaire. Le parfum qui, de tous les temps, représentait un produit de luxe destiné à un cercle restreint de consommateurs, ne l’est plus aujourd’hui.
Le marché se banalise. Mais,quoi qu’il en soit, il y a là un point fort. Des milliers et des milliers de clients s’initient à ce grand monde de la beauté et de l’esthétique. Ils y font leurs premiers pas, c’est une sorte d’université et d’apprentissage.
Et c’est alors qu’apparaissent les niches. Je cite Frédéric Malle: « Mon concept est une réaction à ce qu’est devenu le marché. J’ai voulu redonner aux parfumeurs leur liberté et par la même occasion aux clients les plus regardants la possibilité d’acheter un parfum moderne de grande qualité- chose qui, à mes yeux, n’existe quasiment plus ».
Le temps passe, et on assiste en ce moment à la saturation du marché de parfums de niche.
Il est grand temps de se rendre compte que le marché de la parfumerie s’oriente à grands pas vers le luxe d’où il tire ses origines. Je cite de nouveau F. Malle : « …je tiens à me spécialiser pour aller de plus en plus vers le luxe, la qualité et surtout l’innovation ».
Aucune société n’a jamais été ni unie, ni homogène, ni uniforme. Il y a et il y aura toujours des soi-disant partis, sectes, castes, couches (les noms ne manquent pas) qui ont leurs propres attributs à eux. Sacs Louis Vuitton à des milliers d’euros, voitures, montres, châteaux qui coûtent des fortunes. Le marketing avance.
A chacun son choix!
Et n’oublions pas la grande Chanel qui nous a très bien manifesté que c’est pas le contenant qui compte mais le contenu qui prime !
Un petit P.S :
J’aime beaucoup le commentaire de Ginger 92 pour l’article concernant le sujet « Un parfum a-t-il besoin d’être cher? »
https://parfums-tendances-inspirations.com/2014/05/06/un-parfum-a-t-il-besoin-detre-cher/